Carte postale confinée – Caroline Soldevila

Chère L-Imprimerie,

Aujourd’hui, je reviens dans tes murs afin de reprendre contact avec toi, faire une coupure avec le quotidien, sortir de mes murs, l’appart, la famille, et voir si je peux reprendre mes projets.

Mais une sensation étrange m’envahit: Dans ma tête comme dans tes murs c’est le B-A-Z-A-R!

Tout est en chantier – et pour cause – nous étions en train de monter notre première exposition de l’année 2020: «si les murs pouvaient parler», quand on nous a annoncé que toutes les activités devaient être suspendues pour nous protéger au mieux de ce virus.

Du bazar, tu le sais, nous en avons connu en 11 ans. Un bazar coloré, vivant (champignons sur tes murs, dans le frigo), du bazar qui nous dit qu’il est vraiment temps de faire une petite visite à la déchetterie, du bazar inspirant, du bazar qui montre qu’une idée est en train d’éclore… C’est ce bazar qui me donne des ailes. Il me montre que nous sommes vivant.e.s puisque créatif.ve.s. De plus, l’interdisciplinarité favorise les connexions, les liens, la souplesse, des remises en question, des expérimentations, le partage.

Ce que je vois aujourd’hui, est très différent. C’est un bazar étrange qui véhicule une sensation toute particulière que je n’ai jamais connue. C’est comme si, d’un coup, tout le monde avait dû fuir, laissant tout derrière lui. Et moi, j’arrive aujourd’hui sur ces lieux. Tout est gris, poussiéreux, il n’y a pas âme qui vive. Difficile pour moi de créer dans de telles circonstances. Impossible même. Je bloque. Mes mains ne fonctionnent plus comme avant, j’ai déjà perdu mon habileté et ma tête n’est pas là. La création devra attendre.

Il s’agit alors d’accueillir cela, de trouver un équilibre. Il faut se rendre à l’évidence: mes projets de mobiles-stabiles avec Jonas, la mise en scène photographique de mes boucles d’oreilles «méditerranéennes» avec Marie -Pierre et la communication de mes prochains cours avec Stéphanie, patienteront. En attendant je profite de notre semi-confinement pour me balader et me nourrir de tout ce dont la nature nous offre en ce moment: couleurs, odeurs, chants. C’est un régal.

 

Caroline Soldevila