Carte postale confinée – Jonas Meylan

ATTENTION LES OBJETS DANS LE MIROIR SONT PLUS PROCHES QU’ILS NE PARAISSENT

Chère Imprimerie,

J’ai une confession. Au début, je me suis réjoui du confinement. Au début, il a levé un poids qui persistait depuis quelques mois. Un sentiment de trop, trop vite, tout, tout de suite.

Au début, je me suis senti libre. Libre avec les deux pieds encrés dans la réalité. Je vivais au jour le jour et j’avais imaginé une autre vie. Une vie régie par le soin; le soin à soi, le soin aux autres, le soin aux choses.

Puis on m’a parlé de reprise, de retour en avant. Ils m’ont dit, attention il ne faut pas louper la coche, il faut rattraper le temps perdu, il faut redémarrer la machine.

Mais moi, j’avais pas arrêté la machine. Ma machine elle était juste partie ailleurs. Ailleurs où il fait tout le temps beau. J’étais plus serein, plus heureux.

Depuis, il pleut.

Chère Imprimerie,

J’ai encore une confession. Au début, tu ne m’as pas manqué. Au début, j’étais bien chez moi. J’avais plus besoin de tes murs pour me sentir bien. Les priorités avaient changé.

Puis, tu m’as manqué. Enfin, elles m’ont manqué. Elles, ce sont celles qui partagent, qui créent, qui m’inspirent.

Alors depuis qu’il pleut, je reviens et elles me rappellent qu’ailleurs n’est pas si loin.

Jonas