Si les murs pouvaient parler
L’exposition «Si les murs pouvaient parler… constitue la première étape de la restitution d’un travail de recherche de type ethnographique réalisé auprès des artistes de l’atelier collectif L-Imprimerie depuis l’hiver 2019, sous la forme d’entretiens individuels. Lors de chaque rencontre, le même protocole a été mis en place. L’histoire collective du lieu tout comme le parcours et la pratique personnelle de chacun·e ont été abordés sous trois formes: des récits, des images et des médiums.
Les longs et passionnants entretiens avec chacun·e des occupant·e·s de l’atelier nous ont permis de faire ressortir certains thèmes en lien avec des questions autour de ce qu’est L-Imprimerie en tant qu’atelier d’artistes partagé; l’approche de ces dernier·e·s au travail et à la création ; leur rapport au monde extérieur. L’avidité d’apprentissage, l’expérimentation, le besoin de découvertes et de collaborations semblent être les traits transversaux des parcours d’artistes riches et singuliers. Il apparaît également que pour la plupart d’entre elles et eux, L-Imprimerie n’est pas d’abord le lieu d’une activité lucrative mais avant tout celui d’une activité de création souvent décrite comme vitale. C’est encore un lieu de ressourcement, de rêve, de partage; un endroit où l’on se permet de baisser sa garde: un peu caché, un peu souterrain, atteignable par une double porte, pas totalement en retrait mais un peu à l’écart du monde comme un bastion protégeant ses occupant·e·s. Ici, le processus y est souvent décrit comme supérieur au résultat. L’humilité alliée au geste, à la technique et au savoir-faire font volontairement de la place à l’imparfait, au cassé, au recyclé, à l’indéfini. C’est une hétérotopie!
Pour «faire parler les vieux murs de L-Imprimerie, nous avons proposé aux artistes du lieu de réaliser une œuvre collective en habillant ensemble, de petites et grandes histoires, les murs de la nouvelle structure construite tout exprès au sein de l’atelier : une narration commune qui forme des familles de genres et des compositions visuelles ou poétiques. L’exposition raconte ainsi l’histoire du lieu depuis l’angle de ses actuel·le·s résident·e·s, à partir des récits, images, et objets qui leur sont propres et qui ont été sujet, pour l’occasion, à des sélections, des compositions, des mises en liens et des croisements. Accompagnés par une bande sonore restituant les bruits ordinaires de l’atelier, ces artefacts permettent une incursion du public au plus près de métiers, de gestes, et de savoir-faire en rompant à la fois les distinctions disciplinaires. Ils semblent dès lors nous raconter les nouvelles possibilités et les hybridations futures de L-Imprimerie.
En faisant parler le lieu, cette histoire subjective multivocale déborde de ses marges et éclaire aussi des pans de l’histoire locale plus large comme celle des ateliers en contexte post-industriel à Lausanne ou encore celle de l’atelier avant qu’il ne devienne un atelier… Dès lors, plusieurs lieux et plusieurs décennies sont contenus dans un seul espace où les existences se croisent, s’entrechoquent et se font écho. Un epace-temps fait de montages de temporalités différentes; une mise en espace du temps anachronique, discontinue, proposant ainsi une expérience artistique du temps qui passe.
Clotilde et Jonas
Avec le soutien de la Loterie Romande, la Ville de Lausanne et le Canton de Vaud.
En partenariat avec l’ébenisterie Ana Rodriguez, Prilly, et Auer & Fils SàRL.
L-Imprimerie s’expose…
Au lendemain de l’annonce d’un nouveau semi-confinement, nous avons décidé de maintenir la deuxième exposition collective de la saison 2020 de L-Espace du fond intitulée «L-Imprimerie s’expose… qui présente le travail des résident·e·s de l’atelier L-Imprimerie et de ses invité·e·s.
Parce que la majorité des oeuvres montrées ont été produites en 2020, parce que nous ne voulons pas voir passer nos pratiques et nos productions artistiques au second plan, parce que nous voulons continuer à produire un discours critique sur le monde qui nous entoure, nous avons décidé d’achever la construction de cette exposition malgré l’impossibilité de la rendre physiquement publique. Le choix de présenter ces travaux dans une telle situation est un acte de résistance : une prise de parole contre l’isolement physique et mental d’un grand nombre et contre le creusement des inégalités. C’est l’affirmation de notre refus du rôle non-essentiel auquel a été reléguée la culture ; une volonté de continuer à faire, à créer, à chercher, à fabriquer et ceci à la faveur du partage et de l’échange.
L’exposition est la continuité scénographique de la précédente intitulée «Si les murs pouvaient parler… selon une nouvelle configuration. Elle est constituée d’une composition d’oeuvres produites par quinze artistes et créateur·trice·s.
Certaines œuvres sont finies, d’autres sont des prototypes, des ébauches ou des recherches en cours. La plupart prennent la forme de collections, de séries ou présentent une dimension performative dans leur conception ou dans leur adresse faite au public. Elles font toutes étrangement écho à la situation sanitaire et écologique actuelle.
Certaines forment des narrations voire même convoquent la voix, la prise de parole, jusqu’au cri : ce sont les poèmes en six mots de Laure Bonnevie ou les croquis textiles préparatoires au leporello de Clotilde Wuthrich et Gaël Bandelier ; les porte-voix en argile colorée de Valérie Alonso ou encore les fragments de textes mis en voix d’Amélie Charcosset. D’autres se réfèrent au dedans et au dehors : c’est le voyage rêvé dessiné à l’encre par Silvia Velázquez ; l’autoportrait fondu en pleine nature filmé par Marie-Pierre Cravedi; ou alors, l’espace domestique figuré par ses objets: les assiettes en terre cuite de Margaux Colliard, la tapisserie imprimée de Stéphanie Tschopp et les tabourets en grès de Sylvie Godel et Jonas Meylan.
Certain·e·s artistes invitent le rêve, le souvenir et leurs images fragiles et flottantes, le plus souvent par la céramique : des pièces inspirées du journal intime d’Agathe Naïto adolescente ou alors les souffles produits par les rencontres faites par Sophie Mirra Grandjean. Finalement d’autres artistes mettent en exergue l’équilibre fragile et les contradictions du monde que nous habitons, ce sont les mobiles aériens de Caroline Soldevila et Jonas Meylan ou encore les contre-formes noires en céramique de Michèle Rochat.
Nous remercions les rares et cher·e·s visiteureuses qui ont eu l’audace ou la surprise de nous rendre visite et participer ainsi à cet acte collectif. Nous remercions aussi tous·tes les autres ami·e·s de L-Imprimerie qui sont dans l’impossibilité de nous rejoindre ici, en leur offrant une version virtuelle de l’exposition. N’oubliez pas de prendre soin de vous et de celles et ceux qui vous entourent.
Jonas & Clotilde
Avec le soutien de la Loterie Romande, la Ville de Lausanne et le Canton de Vaud.
En partenariat avec l’ébenisterie Ana Rodriguez, Prilly, et Auer & Fils SàRL.